L’édition 2024
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À la maison de Saint-Louis / Centre d’art et de photographie
Le bâtiment qui accueille depuis 2010 le Centre d’art et de photographie servait auparavant d’aumônerie au Couvent de la Providence. Les religieuses de la Providence vendent le bâtiment de l’aumônerie à la ville de Saint-Louis (Haut-Rhin, Alsace), avec laquelle la ville de Lectoure est jumelée depuis 1981. La maison est inaugurée le 5 septembre 1999 à l’occasion du soixantième anniversaire de l’évacuation des habitants de Saint-Louis à Lectoure.
Indicibles
En quête du point de bascule entre réalité et rêve, Elaine Ling et Juliette Agnel expérimentent la photographie en s’attachant à porter l’attention ce qui n’est pas visible à travers des procédés extrêmement différents. Elaine Ling utilise une caméra 4×5 avec dos polaroid qui lui permet d’obtenir des images positives – négatives dont le tirage final comporte des bords rugueux comme résidus de l’émulsion pelée. Juliette Agnel quant à elle n’hésite pas à recourir au photomontage ou à inverser les valeurs lors de son travail de postproduction tant la photographie dans sa fidélité l’intéresse peu.
Dans son ouvrage Sur la photographie, Susan Sontag écrit que chaque photographie n’est qu’un fragment, sa charge morale et émotive dépendant de son point d’insertion. Une photographie n’est pas la même suivant les contextes où elle est vue. C’est cette expérience d’un autre point de vue sur l’œuvre d’Elaine Ling et de Juliette Agnel qui est proposée ici de ressentir à travers un dialogue relevant de sentiments ou d’intuitions. En se promenant dans le sacré des paysages et de la minéralité, Juliette Agnel et Elaine Ling invitent, semble-t-il, à une méditation sur l’union des êtres humains et de leur environnement, présentant le sacré comme une interdépendance fragile, la reconnaissance d’un pacte ancien, aux termes simples et sans clauses cachées.
Exposition produite avec le soutien du laboratoire Photon Toulouse.
Elaine Ling
Voyageuse et photographe infatigable, violoncelliste de renom et médecin réputé, Elaine Ling était une aventurière. Née à Hong Kong, elle vivait au Canada depuis l’âge de neuf ans. C’est à cette époque qu’elle découvre les grands espaces canadiens, et son attirance pour la nature. Elle a étudié le piano, le violoncelle et… la médecine. Médecin diplômée de l’Université de Toronto, elle a exercé parmi les différents peuples des Premières Nations du Nord et du Nord-Ouest du Canada, puis à l’autre bout du monde, à Abu Dhabi et au Népal. Recherchant la solitude des déserts, des architectures abandonnées et des anciennes cultures, Elaine Ling explorait l’équilibre fragile entre la nature et les hommes. C’est en photographiant les déserts de Mongolie, de Namibie, d’Afrique du Nord, d’Inde, d’Amérique du Sud, ou encore d’Australie, mais aussi les citadelles de Persépolis, du Machu Picchu, d’Angkor, et les centres bouddhistes du Laos, du Tibet et du Bhoutan qu’elle parvint à capturer ce dialogue.
Elaine Ling est représentée par la galerie VU à Paris.
Juliette Agnel
Juliette Agnel a fait des études d’arts plastiques et d’ethno-esthétique à l’université Paris 1-Panthéon Sorbonne et aux beaux-arts de Paris. Dans les années 1990, elle suit les cours de l’africaniste Jean-Louis Paudrat, se passionne pour Marcel Griaule et Michel Leiris ainsi que pour les expéditions en Chine de Victor Segalen qui lui donnent le goût du voyage. Une rencontre avec le réalisateur et ethnologue Jean Rouch l’amène sur les routes de l’Afrique pendant plus de dix ans.
Juliette Agnel est à la fois une exploratrice de la matière photographique et de l’immensité de la nature. Deux séries photographiques, Laps, fondée sur l’usage du film Super 8 puis Les Éblouis, pour laquelle elle fabrique une camera obscura numérique afin de réaliser un ensemble de portraits, la conduisent à appréhender le flou et l’aléatoire comme possibles traductions de la mémoire des hommes. Selon la galeriste Françoise Paviot qui a proposé sa candidature au jury du prix Niépce : « La facture chromatique de ses photographies, leur grain, leur lumière résulte d’un travail complexe, parfois aussi primitif, mais toujours attentif à ce qui en fait la matière même. »
Une nuit de 2016, en Espagne, la sensation d’être immergée dans le ciel étoilé du désert des Bardenas réactive en elle une expérience fondatrice vécue dans les plateaux du pays Dogon quelques années auparavant : celle du lien indéfectible de l’homme à la nature. En découle la série des Nocturnes fabriquée en deux temps – de nuit, l’observation et la photographie des étoiles et de jour, celles du paysage désertique – et exposées dans des caissons lumineux notamment lors des Rencontres d’Arles et de la FIAC en 2017. Le travail réalisé devient le point de départ d’autres séries telles que La lune noire et La grande montagne. Par la suite, des ruines des nécropoles soudanaises aux monts d’Arrée en passant par le Groenland, la photographe voyageuse capte le rapport de l’humain à la puissance géologique ou végétale des paysages. Sa dernière série La main de l’enfant consacrée aux grottes préhistoriques d’Arcy-sur-Cure a été exposée aux Rencontres d’Arles à l’été 2023.
L’art chez Juliette Agnel tient à cette relation du réel à l’invisible, à un absolu qui nous dépasse et nous pousse à interroger les fondements de notre humanité. Pour elle, il s’agit de poursuivre inlassablement la même quête en observant ces forces qui nous entourent mais que nous ne voyons pas : « saisir ce qui nous unit en profondeur, en rappelant que le petit corps d’Homme est un fragment signifiant du cosmos. »
Juliette Agnel est représentée par la galerie Clémentine de la Féronnière à Paris.
À la Cerisaie
Juchée sur la pointe des remparts sud de la ville de Lectoure, la Cerisaie comprend un jardin et une petite maison attenante. Sa dénomination est liée à sa création : c’est un dramaturge de passage à Lectoure qui a déposé de la terre provenant du jardin de Tchékhov à cet endroit. On y planta ensuite des cerisiers. La maison actuelle qui accueille les expositions du festival en été est un vestige d’une tour plus imposante. Elle était probablement celle du fontainier et était habitée jusque dans les années 1970.
L’indifférence des astres et autres matériels transformistes
Au premier regard, l’installation L’indifférence des astres et autres matériels transformistes, initialement imaginée et montrée dans la maison Jean Cocteau à Milly-la-Forêt, semble n’être qu’un ensemble de draps qui sèchent dans un jardin. Pourtant, munis d’un smartphone, les visiteurs découvrent un ensemble de représentations graphiques de la lumière. Diffraction d’Airy, raie verte, lentille de Fresnel, etc., jouent avec l’effet naturel solaire ainsi qu’avec l’effet mécanique du flash des appareils photo. Inspirée par le récit, La Belle et la Bête – Journal d’un film, où Jean Cocteau raconte, avec humour et parfois contrariété, devoir toujours courir après la lumière, celle du soleil et des fausses teintes, celle de son opérateur qui lui oppose l’indifférence des astres. Ainsi, les ÉpouxP invitent-ils les visiteurs à attraper l’image à la manière de Jean Cocteau.
Dans la maison du fontainier, une installation type camera obscura imaginée et produite pour L’été photographique de Lectoure est inspirée par les inventions photographiques et les recherches sur la lumière de Louis Ducos du Hauron, inventeur de la photographie en couleurs dont le brevet fut enregistré à la sous-préfecture de Lectoure en 1868.
Les ÉpouxP
Il paraît que les ÉpouxP sont un vrai couple. Ils se connaitraient depuis le lycée.
Il paraît qu’ils ont fait une exposition sur le rêve de voler au musée de l’Air et de l’Espace, qu’ils ont transformé Clément Ader en chauve-souris et redonné vie à Gustave Eiffel.
On dit qu’ils font parler les archives.
On dit qu’il a filmé une chorégraphie de tondeuses en Islande et qu’il aurait exposé au musée de la photographie de Reykjavik.
On dit qu’elle pratique des techniques anciennes de photographies.
Il parait qu’elle a conçu avec des personnes sans abri une installation pour la Nuit Blanche.
On dit qu’elle aurait réactivé la dernière image d’écrans d’ordinateurs brisés.
Son travail aurait été censuré en Chine.
Il aurait pratiqué l’affichage sauvage dans les villes de Cahors et du Bourget.
Elle aurait créé un herbier fantastique géant au cyanotype avec les élèves d’un lycée agricole du Lot.
Il aurait filmé la cérémonie de réconciliation avec la nature des chamanes du Yunnan.
Il paraît qu’ils ont arpenté et photographié le département de Seine-Saint-Denis et animé de nombreux ateliers photo avec les lycéens.
Il paraît qu’ils ont témoigné des attentats d’Oslo.
Il se dit qu’ils ont été les artistes invités à la prochaine ouverture du musée Albert Khan.
Il parait que Les ÉpouxP sont en mesure de fournir un document biographique plus officiel.
Louis Ducos du Hauron
Louis-Arthur Ducos du Hauron (1837 – 1920) vécut successivement à Libourne, Pau, Agen, Tonneins, puis à Auch où son père décéda en 1863. À partir de cette date, célibataire, il suivit toujours son frère Alcide Ducos du Hauron, magistrat – mais également poète, peintre et dessinateur – dans ses différents lieux d’affectation professionnelle : à Agen dès 1864 et à Lectoure entre avril 1868 et décembre 1869.
C’est le 23 novembre 1868, à la sous-préfecture de Lectoure, que l’inventeur dépose le premier brevet sur la photographie des couleurs, Les couleurs en photographie, solution du problème. Il y décrit des procédés trichromes permettant notamment, à partir de trois négatifs d’un même sujet (obtenus séparément, l’un derrière un filtre bleu-violet, le second derrière un filtre rouge-orangé, le troisième derrière un filtre vert), la réalisation, par synthèse soustractive, de tirages multiples, opaques ou transparents, d’une stabilité telle qu’ils pouvaient être observés et conservés à la lumière.
Esprit visionnaire, très prolifique, mais néanmoins méthodique et opiniâtre, Ducos du Hauron fut sans doute l’un des plus grands chercheurs utopistes de son temps. Il multiplia les inventions dans de nombreux domaines : la photographie des couleurs (dès 1862), la reproduction de dessins et de gravures par la photographie (1867), la photographie animée (1864), son périscope dit « canne œil de géant » permettant de voir et de photographier au-dessus de la foule (1903), ou bien encore sa « cigarette indéroulable » (1864) et son « moteur-girouette ou moulin à vent horizontal » (1869).
Chevalier de la Légion d’honneur en 1912, Ducos du Hauron termine cependant sa vie dans des conditions difficiles et dans un certain dénuement : largement oublié, voyant ses travaux fondamentaux insuffisamment reconnus mais profitant à d’autres, il fut recueilli en août 1914 par sa belle-sœur, Marie-Césarine de Fourcauld, veuve Alcide Ducos du Hauron, au Temple-sur-Lot, puis à Agen.
D’après les recherches et publications de Joël Petitjean, Docteur en histoire de l’art et chercheur spécialisé en photographie ancienne.
À la Halle aux grains
Édifice bâtit entre 1842 et 1846, la halle aux grains flanquée de quatre tours a été construite sur les décombres de la précédente halle détruite par un incendie en 1840 et qui accueillait les boucheries de la ville de Lectoure. De style néo-classique, la nouvelle halle plus moderne fut propice au développement des échanges commerciaux. La halle aux grains est, depuis les années 1960, devenue salle polyvalente et accueille différentes manifestations de la ville dont le festival de l’été.
Novum Glossarium
Pour cette nouvelle installation imaginée à l’occasion de L’été photographique de Lectoure, Thomas Mailaender transforme la Halle aux grains en musée d’archéologie. Plusieurs centaines de poteries de grès – jarres, amphores, bouteilles, pots, assiettes, etc. – se trouvent parées de chromos, technique photographique datant de 1870 utilisée dans les arts décoratifs.
Détournés de leurs usages premiers, ces objets sont supports et reflets du caractère encyclopédique que revêt les collections d’images du 20ème et 21ème siècles collectées par Thomas Mailaender depuis une vingtaine d’années sur internet où tout est à vendre.
Musée archéologique du futur, cette installation résonne comme une archive contemporaine éternellement durable monumentalisée par la cuisson des temps présents et passés d’une civilisation qui semble vouée à disparaître.
Thomas Mailaender
Située au croisement de plusieurs disciplines, la pratique artistique de Thomas Mailaender interroge le rôle et la fonction première de l’image par une approche protéiforme de la photographie. Artiste multimédia basé à Marseille, Mailaender poursuit de nombreuses recherches visuelles par l’utilisation de différentes techniques photographiques mais aussi par l’ajout de matériaux singuliers réinvestis dans un contexte muséal.
Ses installations, souvent monumentales, questionnent la place de l’image et sa matérialité dans nos sociétés par l’incorporation de photographies trouvées sur internet mais aussi dans des brocantes et des marchés aux puces. Collectionneur invétéré d’images anonymes, Thomas Mailaender a rassemblé un corpus de plus de 11000 documents dans une importante collection intitulée The Fun Archive, dont une partie sera présentée. Explorant les archives du numérique, l’artiste y déniche des images vernaculaires, souvent insolites, qui mettent en exergue l’absurdité des comportements humains. Symptomatiques de nos sociétés ultra-connectées, les sujets explorés par l’artiste questionnent leur rôle et leur fonction première de l’image en tant qu’objet institutionnel et sa réappropriation à des fins artistiques.
Thomas Mailender bénéficie durant l’été 2024 d’une exposition sous forme de carte blanche à la MEP à Paris : Les belles images.
À l’école Bladé
L’école Bladé, est située à l’angle de la rue des Frères Danzas et de la rue Dupouy. L’école des filles fut construite en 1883. Le bâtiment, qui accueille régulièrement les expositions de L’été photographique de Lectoure, faisait partie de l’hôtel Saint-Géry. Les écoliers ont quitté les lieux en janvier 2020 et ce lieu municipal est voué à se transformer en un espace associatif et culturel dans les années à venir.
C’est l’arbre qui voit
Entre mémoire collective et récit intime, depuis le nord du Portugal jusqu’à la France, C’est l’arbre qui voit est une traversée des frontières tant physique que poétique. De sa double culture, Esmeralda Da Costa produit
un ensemble d’œuvre-images, un hommage à ses racines mais aussi à la terre nourricière qu’est notre planète.
« Comment sauver quelque chose du temps lorsque le temps – et le temps, évidemment, ne sait rien faire d’autre – continue de s’effriter en passant de main en main ? Esmeralda Da Costa aborde cette question par des structures polymorphes où les territoires et les récits s’entremêlent. La mémoire a des racines profondément ancrées dans le corps qu’elle parcourt en se transformant : comment, des lors, transmettre cette mémoire de génération en génération tout en conservant son énergie mutante ?
Le Nord du Portugal, région d’origine d’Esmeralda Da Costa, est confronté à des défis majeurs liés à la disparition des zones agricoles et à l’asséchement des rivières. À la différence du Sud, dominé par de grands propriétaires terriens, cette partie du Portugal est caractérisé par des exploitations de taille modeste, à caractère familial. C’est dans ce contexte que la mémoire acquiert une importance particulière : l’enjeu du travail d’Esmeralda Da Costa se situe dans l’articulation de la mémoire collective et des souvenirs
individuels.
Dans ce travail sur la vie agricole, la mémoire et le foyer, il n’est pas question de paysage, de portrait ou d’archive. Il en va plutôt d’un dépassement de tout ce qui pourrait enfermer, résumer ou prouver un fait.
Les formats, dans l’alliance de la deux-dimensions et de l’image-mouvement, s’animent d’un temps qui n’est ni linéaire ni figé : ici, chacun devine, décèle, capte une histoire fugace, balbutiante et anachronique. La mémoire ne fonctionne pas de façon structurée mais par à-coups, suffocations et allers-retours. »
Extrait du texte de l’exposition personnelle d’Esmeralda Da Costa (Sauver quelque chose du temps, été 2023, salle d’exposition de Tauves) écrit par Elora Weill-Engerer, historienne de l’art, critique et commissaire d’exposition.
Esmeralda Da Costa
Défiant son propre corps, Esmeralda Da Costa esquisse d’abord une œuvre questionnant le corps intime, la filiation et la mémoire à travers des installations vidéos. Ses œuvres immersives révèlent peu à peu l’autre. Naturellement, le corps social et politique devient alors un élément central dans sa pratique. Elle propose des installations sonores mêlant l’humain et la technologie pour interroger les mutations profondes du monde et l’évolution des modes relationnels. Elle filme et photographie le déchainement des éléments naturels puis compose et assemble des images en miroir du vivant menacé. Sensible à la manipulation de l’information par les médias, elle détourne les visuels de la presse papier autour d’un travail de linogravure.
Dans une création en 2021, elle s’approprie l’histoire d’une œuvre du patrimoine français – la Tapisserie de l’Apocalypse d’Angers – et en propose une interprétation contemporaine marquée des bouleversements sociaux de notre temps. Ses dernières créations, exposées en Auvergne durant l’été 2023, interrogent les pratiques agricoles et notre rapport à la nature plus largement. Pour se faire, elle a créé un ensemble d’œuvres photographiques sur bois qui incorporent de la vidéo.
Punti di vista
Exposition collective – Focus sur une jeune génération de photographes corses
Commissaires de l’exposition : Madeleine Filippi et Lydie Marchi
L’esthétique documentaire particulière qui émane des pratiques photographiques des six artistes corses sélectionnés, Sébastien Arrighi, Yoann Giovannoni, Yan Leandri, Lea Eouzan Pieri, Mattea Riu et Lou Sémété, se situe à l’interstice d’un engagement politique et d’une forme de syncrétisme.
Ici, pas d’approche frontale des conflits sociaux et politiques présents sur l’île, on les devine pourtant aisément : les problèmes d’eau, les enjeux démographiques ou la perte de repères culturels. Ils sont abordés par les artistes de manière poétique, empreinte de romantisme, loin des clichés habituels sur la Corse. Comme en témoigne le travail sériel, le recours à des motifs tels que la trace, la ruine, la voiture et autres objets abandonnés ou calcinés dans le maquis, ou encore les représentations d’un territoire en mutation. Ces motifs suggèrent tour à tour l’oubli, la perte et l’errance auxquels est confrontée une génération en quête de repères. Ils deviennent un métalangage scandé par les artistes. La Corse est un territoire où on ne crée pas de la même manière. La géographie de cette île, son histoire et ses combats induisent un rapport au temps particulier et les expressions plastiques s’en trouvent spécifiques et singulières.
L’exposition Punti di vista reste en bordure, sur le chemin de la ville ou du village il n’est pas question de guider le spectateur, de lui donner des points de repères, il se trouve comme cette génération dans un temps latent, glissant, qui s’approche de demain et s’éloigne d’hier.
Madeleine Filippi, critique d’art et commissaire d’exposition indépendante.
L’exposition est réalisée avec le soutien de la Collectivité de Corse et du laboratoire Photon Toulouse.
Sébastien Arrighi
Sébastien Arrighi photographie aussi bien des univers qui lui sont familiers, qu’étrangers. L’itinérance, associée à la prise de vues, lui permet de voir le monde au- delà de l’intellect et de questionner d’où les choses procèdent. Sa vision oscille entre réel et fiction, renversant des sujets triviaux, en récits énigmatiques.
Originaire d’Ajaccio, Sébastien Arrighi est diplômé de l’École supérieure d’art d’Aix-en-Provence avec les félicitations du jury, il est le fondateur du festival de photographie Mascarone lab à Bastelicaccia (Corse-du-Sud). En 2020 son travail sur la Méditerranée, Shivers, reçoit l’aide du Centre national des arts plastiques pour la réalisation de sa première monographie, parue en 2022 aux éditions Poursuite (Arles). En 2021, son exposition monographique Era Ora « il était temps » est présentée avec le soutien de la Collectivité de Corse à la Compagnie (Marseille) durant le 13e festival du Printemps de l’Art Contemporain. Elle est composée, entre autres, de ses recherches sur son île natale qu’il nomme Ora « l’heure, le temps ». En 2023, ce relevé topographique et émotionnel qui interroge l’insularité s’est enrichi d’un nouveau territoire, la Nouvelle-Calédonie, avec l’appui de la Direction Régionale des Affaires Culturelles PACA. Dans le cadre de la Bienalsur 2023, il participe à une résidence croisée avec le Frac
Corsica et le Ministère de la Culture d’Arabie saoudite à Riyadh. Son travail Desert Rose fut ensuite exposé au Fena Alawwal (Riyadh), au MUNTREF (Buenos Aires), ainsi qu’au Centre Una-Volta (Bastia). Il entretient également depuis plusieurs années une correspondance avec un ex-champion de rodéo, et lui rend visite pour la première fois en 2023 au Texas, pour questionner l’imaginaire du cowboy à travers cette pratique sportive spectaculaire.
Yoann Giovannoni
Après avoir exercé plusieurs métiers dont ceux de manutentionnaire, chauffeur-livreur, ou encore peintre en aéronautique, Yoann Giovannoni décide en 2017 de travailler avec la photographie en prenant son environnement proche comme sujet privilégié. Son approche est d’abord spontanée et répond à une nécessité d’exercer son regard à l’intérieur d’espaces quotidiens. Il envisage la pratique de la photographie comme une expérience du monde vue à travers par l’appareil.
Area est son premier travail, il témoigne du phénomène d’effacement et traite ainsi ces nouveaux espaces comme faisant partie intégrante de l’ile. Ses recherches l’on mené à travailler sur le paysage il y interroge la notion de mémoire et d’uniformisation dans un contexte de réaménagement du territoire ainsi que ses propres représentations. Il anime en parallèle de ses travaux des ateliers lié à l’image et à la photographie pour la jeunesse.
Yan Leandri
Depuis le village de Granaccia, Yan Leandri travaille à une recherche sur la Corse, son principe insulaire, ses mythes, son histoire. Par un fil centré sur le récit, il s’agit d’arpenter les différentes couches que crée l’image, le saisissement de la parole et des histoires, guidé par la lecture double des signes : l’amphibologie.
Yan Leandri est actuellement en année de césure à l’École nationale supérieure de la photographie d’Arles après un parcours universitaire à l’Università di Corsica, à l’Université de Nîmes et l’Université
Paris 8 | Vincenne – Saint-Denis.
Lea Eouzan-Pieri
Le travail photographique de Lea Eouzan-Pieri s’articule autour des nouveaux espaces politiques et les conséquences de leurs mutations. Histoire(s) contemporaine(s) une importante série sur les camps d’extermination en Pologne, d’internement en France durant la Seconde Guerre Mondiale ne se pose pas en tant que travail d’archives mémorielles et historiques mais interroge la mise en spectacle de ces lieux de tragédie aujourd’hui. De ce constat émerge la question de la mémoire, de sa gestion, de sa consommation.
Elle mène, plus récemment, un travail de recherche autour des changements profonds du paysage insulaire corse. Pour représenter le territoire, Lea Eouzan-Pieri interroge la réémergence du lieu dans le paysage, d’un point de vue archéologique, utilisant le présent comme fondation. Lea ne cesse de confronter le médium photographique avec « l’image », l’omniprésente, la dévorante, celle de nos sociétés occidentales.
Lou Sémété
Née en 2001 dans l’extrême-sud de la Corse, Lou Sémété a grandi et étudié dans sa région natale jusqu’à sa majorité. Elle a ensuite intégré une classe préparatoire en art à Sartène, avant de poursuivre ses études supérieures au MO.CO.Esba (école supérieure des Beaux-Arts de Montpellier). Actuellement en cours de préparation de son DNSEP, Lou mène une réflexion artistique poétique et engagée autour de la perception des territoires et de l’impact de l’homme sur ces derniers, tout en participant à divers projets collectifs. Elle vit et travaille entre le Sud de la France et la Corse.
Mattea Riu
Mattea Riu a quitté la Corse à 18 ans pour faire des études, d’abord de cinéma à Nantes, avant d’intégrer les beaux-arts à Cergy. Depuis l’obtention de son diplôme en 2022, elle vit entre Bastia et Marseille.
Par le biais de différents médiums (photo, cinéma, son, écrit), elle travaille sur les questions de relations aux territoires, sensorielles comme politiques, de mémoire collective et individuelle, et de la vie en commun, du lien entre l’individu et les groupes.,Sa pratique de la photo est quotidienne. Elle photographie des détails qui la touchent, l’interpellent. Dans les images qu’elle fait de la Corse, elle essaie de faire exister la rencontre entre une sagesse presque grandiloquente du lieu, son histoire, ses paysages parfois
impressionnants, et la vie qui y surgit, les corps qui le traverse, la beauté du prosaïque. Elle aime particulièrement les contrastes générés par les différentes temporalités existant au sein d’un même espace. Elle photographie beaucoup Bastia, qui est pour elle une grande source d’inspiration, ville à la fois si vieille, changeante, populaire, qui lui apparaît toujours plus familière comme toujours plus foisonnante.
Aux allées Montmorency et sur le boulevard du Nord
Situées en contrebas de l’ancien château des comtes d’Armagnac, les allées Montmorency offrent une promenade au pied des remparts ouest de la ville, qui s’élèvent sur une falaise calcaire dominant la plaine gersoise.
La danse macabre de Monsieur Boutons
Au Moyen-Âge, la danse macabre était conçue comme un avertissement pour les puissants et une source de réconfort pour les pauvres, un appel à tous pour une vie responsable et pieuse. Son motif est simple : il s’agit de rappeler aux êtres humains le caractère éphémère de la vie.
Lors de leur résidence de création au Centre d’art et de photographie de Lectoure en 2022, Kahn & Selesnick se sont inspirés à la fois des objets conservés au Musée d’Archéologie de la ville, de l’histoire et des paysages de cette dernière, des récits des personnes rencontrées et comme toujours de films, d’expéditions qui ont échoué, de récits d’îles perdues, etc.
Cette danse macabre ne pouvait se réaliser sans modèles et ce sont des habitant·es de Lectoure qui posèrent pour les artistes, se prêtant aux jeux du travestissement lors d’échanges joyeux, tant cette danse emprunte son esprit aux mots de Baudelaire.
Deux ans après leur résidence, les collages photographiques de Kahn & Selesnick viennent habiter les roches des allées Montmorency et le boulevard du Nord, accompagnant ainsi les pérégrinations des promeneurs dans ces paysages.
Kahn & Selesnick
Nicholas Kahn et Richard Selesnick forment un duo d’artistes depuis leur rencontre à l’Université de Washington en 1986. Ils travaillent principalement dans les domaines de la photographie et de l’installation. Ensemble, ils créent des histoires fictives qui se déroulent dans le passé ou dans le futur.
Ils ont participé à plus d’une centaine d’expositions individuelles et collectives et ont travaillé dans plus de vingt collections, dont le Boston Museum of Art, le Brooklyn Museum of Art, le Philadelphia Museum of Art, le Houston Museum of Art, le Los Angeles County Museum of Art et la Smithsonian Institution.
Nicholas Kahn & Richard Selesnick ont été accueillis en résidence au Centre d’art et de photographie de Lectoure en 2022. Ils avaient exposé le projet Eisbergfreistadt lors de L’été photographique de Lectoure en 2017.
À la tour de Corhaut
Unique tour subsistante de l’enceinte médiévale fortifiée de la ville, la tour de Corhaut est transformée en lieu d’exposition pour la première fois cette année dans le cadre de L’été photographique de Lectoure.
Rihla fil wãha
Les photographies inédites de Driss Aroussi présentées aux côtés du film Borj el Mechkouk sont à la limite entre photographie documentaire et photographie personnelle. Réalisées avec un appareil argentique, elles sont empreintes d’un regard doux et bienveillant sur un sujet frôlant l’autobiographie, les lieux ou personnes photographiées appartenant à son entourage géographique ou familial. Elles capturent à la fois l’incroyable, l’ordinaire et l’intime en y mêlant une poésie et un sens politique certain.
Si une forme de réalité est ici reproduite, c’est une réalité familière à Driss Aroussi où la narration prend une part active. Elle y est lente. Sa matérialité convoque un désir de contemplation presque en dehors du cycle de la vie, cycle où le film « (…) Borj el Mechkouk nous emmène sur les traces d’un homme envoyé par le village avec son ânesse afin d’observer et éventuellement dé-sabler un système de galeries d’eau souterraines appelée Khettaras. Une technique utilisée depuis des siècles par les villageois pour
irriguer les terres agricoles. Sans jamais sombrer dans le pathos, ce film qui traite d’un sujet écologique d’actualité prend la forme d’une enquête.
À travers différentes scènes et accumulation d’évènements se déroulant plusieurs jours durant, le spectateur suit un homme à la recherche d’eau dans le désert. Au-delà du récit poétique, la production artistique de Driss Aroussi porte ici, comme ailleurs, la question du politique. Elle met la lumière sur une situation complexe de la condition humaine. Par ses choix de narration, le réalisateur réussi à faire d’un récit circonscrit à un contexte spécifique, un sujet universel qui rend tangible les conséquences du changement climatique sur les populations locales. »
Jeanne Mercier, 2023
Texte produit et diffusé par le réseau Documents d’artistes
Exposition produite avec le soutien du laboratoire Photon Toulouse.
Driss Aroussi
La démarche artistique de Driss Aroussi est polysémique, empruntant plusieurs pistes de recherche, navigant entre expérimentation et forme documentaire : ces deux parts du travail articulent une forme d’engagement à l’envie d’inventer toujours à l’endroit où il se trouve. Dans sa pratique, Driss Aroussi fait appel à ce qui permet de reproduire le réel comme la photographie ou de le saisir comme la vidéo. Le réel pour lui porte aussi la marque du travail, les stigmates de ses contradictions, les signes de la transformation qu’il opère sur notre réel.