L’édition 2005
Les expositions
Les partenaires
À la maison de Saint-Louis / Centre d’art et de photographie
Jean-François Joly – Safari
Depuis de nombreuses années, j’ai choisi d’orienter mon engagement photographique vers des personnes vivant en marge de nos sociétés. Pour avoir passé de longs moments à leurs côtés, lors de divers reportages, j’ai réalisé à quel point ces gens sont meurtris, blessés, ignorés du monde qui les entoure. Qu’ils soient sans domicile fixe, toxicomanes, issus de communautés minoritaires, leur présent est un enfer physique et moral dont ils ne peuvent s’échapper. Omniprésents dans les rues de nos cités, ces êtres en souffrance nous interpellent, parfois nous dérangent, car ils nous renvoient l’image de notre propre fragilité. Depuis de nombreuses années, j’ai choisi d’orienter mon engagement photographique vers des personnes vivant en marge de nos sociétés. Pour avoir passé de longs moments à leurs côtés, lors de divers reportages, j’ai réalisé à quel point ces gens sont meurtris, blessés, ignorés du monde qui les entoure. Qu’ils soient sans domicile fixe, toxicomanes, issus de communautés minoritaires, leur présent est un enfer physique et moral dont ils ne peuvent s’échapper. Omniprésents dans les rues de nos cités, ces êtres en souffrance nous interpellent, parfois nous dérangent, car ils nous renvoient l’image de notre propre fragilité.
En 1993, la rencontre avec le docteur Xavier Emmanuelli et le psychanalyste Patrick Declerck a été déterminante dans l’élaboration et l’approfondissement de mon travail. Dès lors, j’ai abandonné le reportage pour me consacrer exclusivement au portrait, en adoptant une forme identique pour les personnalités (culturelles, politiques, économiques) et pour les personnes qui vivent l’exclusion, quelle qu’elle soit. J’ai choisi de montrer l’Homme dans sa fragilité indépendamment de son statut social. Je photographie toujours dans un format vertical, le plus souvent de face, en étant assez proche de la personne pour qu’elle ne s’efface pas au détriment du contexte.
Par ces confrontations, je désire nous amener à nous interroger sur notre propre condition. L’utilisation d’une chambre photographique privilégie l’intimité dans mon rapport avec la personne photographiée. Le choix d’un film instantané me permet de lui donner immédiatement son image, si elle le souhaite. Ainsi, je ne fais pas que prendre, je donne aussi une photographie. Dans le cadre de l’Été photographique de Lectoure, je présente une projection de cent portraits d’anonymes et de personnalités réalisés entre 1993 et 2005. • Jean-François Joly, mai 2005.
La projection de Frontales sera accompagnée de la parution d’un ouvrage – livre et DVD –, édité par l’association La grange aux images, avec le concours du Centre de photographie de Lectoure, de l’association Gwin Zegal et de La passerelle, scène nationale à Gap.
Lisa Nguyen – Souvenirs du Vietnam
Au Vietnam, le souvenir de la guerre n’est à l’échelle ni d’un musée ni d’un mémorial mais à celle d’une nation. Alors Liza Nguyen part dans un pays familier, celui de son père, dans lequel elle n’a pas grandi et dont elle est étrangère. Comment faire le deuil d’une histoire et d’un pays que l’on n’a pas connu ? Sa question devient la nôtre, celle que pose toute mémoire : comment prétendre commémorer une histoire encore présente ? En réponse, ses photographies proposent une cartographie de la mémoire qui reproduit celle de la guerre : Hanoi, Haiphong, Diên Biên Phu, Da Nang, My Lai, Saigon… […] « Surface, dit la photographe, représente une poignée de terre emportée comme souvenir sur des lieux de mémoires, des sols chargés d’histoire sur lesquels ont combattu des Français et des Américains. Une terre indexée à l’histoire, à des corps devenus poussière ». […] L’itinéraire de la photographe reprend celui des bombardements meurtriers et des déversements d’herbicides sur le territoire du Vietnam. […] Que partage-t-on avec ces images, que partage-t-on avec cette histoire ? Précisément ce qui leur manque, ce qui nous manque, une perte dont les restes de terre disent l’inhumanité de leur passé. […]
Ce témoignage se pose en miroir de ce qui tient lieu de mémoire officielle : musées de la guerre, anciens chars, hélicoptères, camions ou bateaux militaires érigés en stèles ou en mémoriaux, monuments aux morts et statues des grands hommes… Comment accueillir les souvenirs réordonnés d’une histoire de l’horreur ? Les photographies se transforment en Cartes postales du Vietnam, une série de sept dépliants composés chacun de 12 images. Nous sommes invités à regarder l’histoire dans sa forme la plus banale, sa forme touristique. Sommes-nous dérangés par l’horreur de ces images ou par l’horreur de leur point de vue distancié ? […] À quelle histoire appartiennent ces morts dont les visages absents se dessinent dans les éparpillements de terre de Surface et dont les corps meurtris s’exposent dans Cartes postales ? La photographe, dans un geste aussi courageux que troublant, nous rapporte notre histoire et interroge la capacité de l’image à restituer le passé. […]
Octave Debary. Vietnam : photographies et éthique du souvenir (extraits).
Exposition réalisée avec la collaboration de Picto Toulouse.
Bettina Witte Veen – The Heart of Darkness
L’œuvre de Bettina WitteVeen s’édifie sur de grands projets dont la réalisation exige à chaque fois des années de travail. À partir d’une longue enquête historique, l’artiste sélectionne des documents photographiques qu’elle transforme par des interventions plastiques en séries thématiques de tableaux. Chaque projet révèle la dimension universelle des questions qui concernent toute société humaine depuis la nuit des temps. Ainsi, Sacred Sister, fruit de sept ans de travail dans les jungles d’Indonésie et d’Asie du sud-est, est une méditation saisissante en cent tableaux photographiques sur la puissance de la féminité, indépendamment des époques et des régions géographiques. Un autre projet, Gilgamesh, du nom d’un roi de Mésopotamie, actualise l’un des plus anciens récits épiques de l’histoire humaine, découvert sur des tablettes d’écriture cunéiforme dans les ruines de Ninive. L’artiste met en rapport cette épopée qui traite du sens de l’héroïsme et du rôle du souverain dans la civilisation avec l’histoire actuelle de l’Irak. Gilgamesh trace un autre parallèle entre l’apparition du langage informatique et la révolution qu’a représenté il y a cinq mille ans l’invention de l’écriture cunéiforme.
Le projet présenté à Lectoure, The Heart of Darkness, entrepris il y a trois ans, est inspiré du chef d’œuvre de Joseph Conrad. Composé d’ensembles autonomes de cinq tableaux, ce poème photographique se développe par la création d’un nouveau polyptyque à chaque exposition. Bettina WitteVeen y explore certains épisodes de l’histoire des XIXe et XXe siècles au moyen de photos d’archives dotées d’un fort impact visuel. En assemblant des images, fragments d’Histoire recueillis de diverses sources, elle crée des allégories d’une grande cohérence qui nous emportent vers le versant sombre d’une mémoire brute où gisent les drames liés aux génocides, aux guerres et au terrorisme, là où nous assaille cette question : “N’est-ce pas dans la guerre et le génocide que l’Humanité trouve son expression ultime ?”
Mais chaque polyptyque de The Heart of Darkness comporte une image – le plus souvent un portrait – qui rappelle que l’être humain est aussi capable d’altruisme et de héroïsme.
Suzy Lake
Depuis plusieurs années, la recherche photographique de Suzy Lake explore la notion d’identité en s’intéressant tout particulièrement à l’auto-représentation et aux multiples possibilités de l’apparence physique par la personnification de différents individus. […]
Depuis plusieurs années, la recherche photographique de Suzy Lake explore la notion d’identité en s’intéressant tout particulièrement à l’auto-représentation et aux multiples possibilités de l’apparence physique par la personnification de différents individus. […]La photographie donne lieu chez Suzy Lake à différentes mises en scène, permettant à l’artiste d’emprunter avec une grande aisance d’interprétation l’apparence de multiples personnalités, généralement féminines. […] Ce jeu de figuration peut être considéré comme le résultat de performances réalisées la plupart du temps en catimini, comme s’il s’agissait d’un acte privé, comme une répétition secrète étudiant les limites de l’artiste et du personnage, cet autre soi. […]Le passage entre la jeune femme et la femme mûre est presque palpable dans l’œuvre de Lake, ce qui nous amène à supposer que l’artiste puise à même ses expériences personnelles, comme motif d’inspiration, mais également comme processus de validation de sa recherche.[…]
L’artiste se permet des vues rapprochées montrant avec plus d’acuité son âge et les transformations subies par son corps, plus particulièrement celles de son épiderme. Le vieillissement devient alors un terrain de bataille entre ce qui est caché et ce qui est montré. Les tabous sont ainsi mis en perspective et témoignent avec virulence de ce que la majorité des femmes cachent par pudeur ou par désir d’une apparence jeune. […] Cette audace dans la divulgation de la réalité est aujourd’hui presque bannie du médium photographique, puisqu’il est aisé de recourir à une multitude d’astuces et de retouches afin de parvenir à un résultat séducteur. Lake, par son choix des prises de vue en gros plans, prend position. Elle révèle les manifestations de l’âge mûr par une composition présentant seulement une partie de son visage, comme dans le triptyque Forever Young in Song, Study # 2 (2002). La bouche est ici au centre de la composition, les mouvements des lèvres accentuent les traits rendant avec fidélité les rides du temps. L’œuvre Pluck (proof) (2001), va encore plus loin dans son propos en rendant public un geste aussi privé que celui d’épiler son menton.
En dévoilant par l’acte photographique sa réalité “culturelle” de femme, Suzy Lake franchit le pas entre le jeu de rôle et sa propre vie ; la limite devient tout à coup très ténue entre la photographe et l’interprète… […] Cette attitude est courageuse, parce qu’elle aborde un sujet peu à la mode pour ne pas dire embarrassant dans notre collectivité nord-américaine, celui de l’inévitable vieillesse et des réalités qui en découlent. […] La problématique de l’apparence comme influence sur l’identité et la subjectivité de la photographie sont mises à profit en tant que stratégie émotionnelle par Lake.
Jocelyne Fortin. Le langage énigmatique des attitudes et des comportements (extraits), catalogue de l’exposition Attitudes et comportements, Suzy Lake, au Musée régional de Rimouski (Canada) en 2002.
L’exposition est organisée avec le concours du Ministère des Affaires Étrangères du Canada et le Centre culturel canadien à Paris et le soutien de Canada Council college of arts (University of Guelph).
À l’école Bladé
Lien Botha – Safari
Safari est un récit en seize tableaux qui associent le dessin et la photographie. Cette série peut être perçue comme une courte histoire satirique ou comme un guide pour une balade à travers le paysage sud-africain. On peut la lire comme une bande dessinée en photos, qui combine la tradition ancienne du dessin avec celle, plus moderne, de la photographie.
Sur des tables, au milieu de la salle, je disposerai des albums à colorier et des crayons de couleur, de la peinture, etc., pour permettre aux visiteurs, assis dans l’espace d’exposition, de produire leurs propres œuvres. Sur un mur, des modèles en couleur donneront des pistes : par exemple, une carte de formations météorologiques, ou encore une liste des langues indigènes et des langues des colons de l’Afrique du Sud.
Les photos de paysages ont été prises ces deux dernières années, de Springbok à Swartruggens en passant par Loxton ; elles montrent de grands espaces fragiles, où règnent la sécheresse et le silence, le genre d’endroit où je dois retourner régulièrement pour survivre. • Lien Botha
Du 25 juillet au 4 août, Lien Botha et les artistes de la compagnie bordelaise des Limbes(Romain Jarry, Solène Arbel et Loïc Varanguien de Villepin) résideront à Lectoure pour créerle spectacle Cutting Water / Fendre l’eau, qu’ils donneront en automne au festival Nov’art à Bordeaux. Le 3 août en soirée, ils présenteront à Lectoure l’état du spectacle à la fin de la résidence.
L’exposition et la résidence sont organisées en collaboration avec Migrations culturelles aquitaine Afriques et avec le soutien de l’Institut Français d’Afrique du Sud (Johannesburg).
Katherine Knight – Buoy
ibou à Pictou, en Nouvelle-Écosse, est délimité par une série de huit bouées. Ensemble, elles forment un entonnoir qui guide le transport maritime à l’intérieur du chenal. Chargées de lourdes responsabilités, ces balises sont construites pour rebondir sur la surface de l’eau et résister aux variations climatiques et aux intempéries. Obstinées et irremplaçables, elles traversent le flux et le reflux des récits quotidiens et des événements. Les bouées savent se tenir ! On peut les compter et les repérer, elles offrent un point fixe pour permettre aux navigateurs de connaître leur position. Le havre de Caribou à Pictou, en Nouvelle-Écosse, est délimité par une série de huit bouées. Ensemble, elles forment un entonnoir qui guide le transport maritime à l’intérieur du chenal. Chargées de lourdes responsabilités, ces balises sont construites pour rebondir sur la surface de l’eau et résister aux variations climatiques et aux intempéries. Obstinées et irremplaçables, elles traversent le flux et le reflux des récits quotidiens et des événements. Les bouées savent se tenir ! On peut les compter et les repérer, elles offrent un point fixe pour permettre aux navigateurs de connaître leur position. Dans notre projet photographique, le périple par bateau ne mène nulle part. Les bouées roulent à l’intérieur et à l’extérieur du cadre tandis que nous les encerclons, les approchons ou prenons le large. Des extraits vidéos sont projetés et immergent le spectateur dans le territoire des bouées. Je perçois la bouée comme un symbole du limitrophe. Elle porte le sens contradictoire de la certitude et du danger, de la sécurité et de la turbulence. • Katherine Knight
Katherine Knight utilise le langage imagé du paysage pour explorer les notions de mémoire et d’expérience. Elle dit elle-même que son expérience pancanadienne a été un facteur déterminant dans le développement de sa pratique artistique. Dans ses images de paysages du centre et de l’est du Canada, qui sont sa matière première, les éléments occupent une place centrale : l’eau surtout dans de grands espaces aquatiques, mais aussi, le vent, la neige… Ainsi, parmi ses projets précédents, Aerostat se présente comme un portrait du vent et de l’air, qui n ’ont pas d’autre présence matérielle que les traces qu’ils laissent sur les objets. Aux paysages qu’elle filme et photographie en noir et blanc, Katherine Knight ajoute une dimension narrative ou mémorielle en captant simplement la spontanéité d’un moment, en introduisant dans le champ de la caméra un objet ou un geste, ou encore en intervenant sur l’image elle-même pour y incorporer des lettres et autres signes, parfois des mots ou même des textes.
Le Ministère des Affaires Étrangères du Canada et le Centre culturel canadien à Paris apportent leur concours à cette exposition.
À la Cerisaie
Virginie Restain – Autoportrait, 1994 – 2004
La Cerisaie, une petite maison dans Lectoure. Deux pièces. La première, éclairée naturellement, présente en préambule une photographie, deux tout au plus. La seconde, dans la pénombre, est le lieu de projection de 160 photographies, trace de dix années de trois vies et de trois générations : ma grand-mère, ma mère et moi.
Pour l’exposition de l’Été photographique 2005, je voudrais rendre compte de cette durée, une durée qui joue comme une totalité. Cette période de dix ans n’est pas ici une durée fixée arbitrairement et au préalable. Elle commence avec mes débuts dans l’activité photographique et s’achève avec la mort de ma grand-mère, l’été dernier. J’avais 19 ans quand mon grand-père est mort, et l’année d’après, j’ai perdu mon premier amour. Avec le recul, je me rends compte de l’influence déterminante de ces événements personnels qui ont rendu nécessaire mon geste photographique. Pourtant à 20 ans, j’étais surtout heureuse de recevoir de ma mère un boîtier avec un objectif me permettant de me rapprocher de mes sujets. Je n’avais alors aucune intention de construire un album de famille ni quoi que ce soit d’autre. Je voulais seulement photographier mes proches quand la lumière était belle et je photographiais beaucoup ma grand-mère parce que je la trouvais fascinante dans ses attitudes de femme. En même temps que j’accumulais, dans l’intimité de la maison familiale, les pellicules sur ses gestes quotidiens et féminins, sans aucune mise en scène ou intention préalable, je développais une pratique de l’autoportrait qui nécessitait davantage de mise en scène et d’anticipation. En 1999, je fus invité à participer à l’Été photographique de Lectoure, pour ma première exposition personnelle. Je cherchais à conjuguer ces deux approches. La Cerisaie, avec ses caractères propres, offrait un cadre familier, parce que pétri de vécu, pour les présenter sous une sorte de diptyque : deux portraits en vis-à-vis, le mien, le sien, le visage, le pubis. Il s’agissait de montrer quelque chose de la femme en assumant le temps. Aujourd’hui, même si pendant dix ans les motifs de la prise de vue ont changé à mesure que ma grand-mère vieillissait, je saisis plus clairement le fil de ma recherche. Derrière l’hommage à celle qui a disparu, l’interrogation porte sur la construction de soi dans la conscience de la durée. Alors, plutôt que d’offrir une forme de portrait de famille, je propose un travail sur l’idée que la conscience de soi se pose en reconnaissant dans la filiation le fondement de l’image de soi.
Virginie Restain, avril 2005.
Exposition réalisée avec l’aide d’Images en scène et la collaboration de Picto Toulouse.
À la Halle aux grains
Jurgen Schadeberg
Né à Berlin en 1931, Jurgen Schadeberg se forme à l’école d’optique et de photographie de Berlin tout en travaillant pour un photographe professionnel. Il est encore adolescent lorsqu’il devient photographe pour une agence de presse de Hambourg. Fortement marqué par la guerre, il souhaite quitter l’Allemagne et s’embarque pour l’Afrique du Sud. Dès son arrivée, il devient photographe en chef et directeur artistique de la mythique revue culturelle de la communauté noire Drum Magazine. “Quand je suis arrivé en Afrique du Sud en 1950, j’ai trouvé deux sociétés qui évoluaient en parallèle, sans communiquer entre elles. Il y avait un mur invisible entre ces deux mondes. Le monde noir ou monde non européen comme le décrivait la société blanche, était culturellement et économiquement rejeté par le monde blanc.” C’est dans ces années que Jurgen Schadeberg réalise des clichés essentiels pour l’histoire de l’Afrique du Sud. Il a alors approché tous les grand leaders historiques de la contestation anti-apartheid, couvert tous les grands événements qui ont ponctué ces années, la campagne de défiance en 1952, les grands procès des années 50 ou les funérailles de Sharpeville en 1960.Né à Berlin en 1931, Jurgen Schadeberg se forme à l’école d’optique et de photographie de Berlin tout en travaillant pour un photographe professionnel. Il est encore adolescent lorsqu’il devient photographe pour une agence de presse de Hambourg. Fortement marqué par la guerre, il souhaite quitter l’Allemagne et s’embarque pour l’Afrique du Sud. Dès son arrivée, il devient photographe en chef et directeur artistique de la mythique revue culturelle de la communauté noire Drum Magazine. “Quand je suis arrivé en Afrique du Sud en 1950, j’ai trouvé deux sociétés qui évoluaient en parallèle, sans communiquer entre elles. Il y avait un mur invisible entre ces deux mondes. Le monde noir ou monde non européen comme le décrivait la société blanche, était culturellement et économiquement rejeté par le monde blanc.” C’est dans ces années que Jurgen Schadeberg réalise des clichés essentiels pour l’histoire de l’Afrique du Sud. Il a alors approché tous les grand leaders historiques de la contestation anti-apartheid, couvert tous les grands événements qui ont ponctué ces années, la campagne de défiance en 1952, les grands procès des années 50 ou les funérailles de Sharpeville en 1960.
Jurgen Schadeberg fut un témoin privilégié de la prodigieuse vitalité intellectuelle et artistique de la communauté noire. Une scène musicale particulièrement riche s’était développée sur le modèle nord américain, notamment dans le domaine du jazz. Certaines de ses photographies, telles que celle de Miriam Makeba, debout derrière son micro en 1955, appartiennent aujourd’hui au patrimoine national.Sa contribution au développement de l’histoire de la photographie en Afrique du Sud est essentielle. Lorsqu’il travaillait pour Drum Magazine, il a formé toute une génération de photographes noirs. Plus récemment, il a contribué à l’éclosion de jeunes talents tels que Santu Mofokeng, Makgotso Gulube et Taryn Millar. Jurgen Schadeberg fut longtemps le seul photographe à s’intéresser aux deux communautés “Comme nouveau venu et étranger, je pouvais facilement passer d’un monde à l’autre…”.
Contraint de quitter l’Afrique du Sud en 1964, il n’y retourne qu’en 1984. Tout en poursuivant son travail de photojournaliste, il réalise des films documentaires et des fictions sur la communauté noire. Il reste un observateur aigu de la société sud-africaine et réalise actuellement un grand projet photographique sur l’afflux dans des squats urbains de modestes agriculteurs noirs chassés de leurs exploitations par de grands propriétaires qui clôturent d’immenses terrains de chasse pour des touristes fortunés. Surnommé “le père de la photographie sud africaine”, Schadeberg est une figure majeure de l’histoire de la photographie du continent africain.
Patrick Descamps
Exposition réalisée avec la collaboration de Patrick Descamps et le concours de South African Airways.
Une exposition de Schadeberg sur la musique et la danse est présentée du 1er au 15 août à Jazz in Marciac par le Centre de photographie de Lectoure. Le 14 août à 18 h, Jurgen Schadeberg retracera son parcours photographique sous la forme d’une projection commentée.
À l’école Gambetta
Guillaume Janot
L’exposition de Lectoure est conçue sur le mode d’un volume posé dans l’espace et porteur de deux images de très grand format, sous forme d’affiches collées. Par sa nature, ce volume fonctionne comme un objet, un module déplaçable, un élément autonome dans le lieu. Le spectateur tourne ainsi autour de ces deux images qui se complètent, s’opposent, et ne sont jamais visibles simultanément. La proposition cherche ainsi à mettre en place un rapport tendu entre les images plutôt qu’un regard linéaire, une relation comparative.L’exposition de Lectoure est conçue sur le mode d’un volume posé dans l’espace et porteur de deux images de très grand format, sous forme d’affiches collées. Par sa nature, ce volume fonctionne comme un objet, un module déplaçable, un élément autonome dans le lieu. Le spectateur tourne ainsi autour de ces deux images qui se complètent, s’opposent, et ne sont jamais visibles simultanément. La proposition cherche ainsi à mettre en place un rapport tendu entre les images plutôt qu’un regard linéaire, une relation comparative.
Ces deux images, comme c’est souvent le cas dans mon travail, sont issues de registres très différents. Elles dialoguent et se complètent sur le mode du paradoxe. La nature morte au billet de banque est un portrait de Mao, dont l’ironie est encore accentuée par l’évolution récente de la Chine. L’autre image est construite sur un geste plein d’ambiguïté, d’offrande et de menace à la fois. L’une des images est mise en scène, l’autre est une situation trouvée.
Je n’ai pas de relation directe à la photo de reportage, je ne cherche pas non plus à décrypter les faits. Ce qui m’intéresse, c’est la faculté des images à jouer avec les signes sur un mode fictionnel, à contenir plusieurs degrés de lecture et de références. Il n’y a pas de message particulier, mais plutôt une articulation qui prend sa source dans l’air du temps pour se prolonger dans l’imaginaire de chacun.
Roses and Guns, un livre de photographies de Guillaume Janot, avec un texte de François Piron, paraîtra prochainement aux éditions Filigranes avec le concours de la galerie Alain Gutharc et du Centre de photographie de Lectoure.
Heidi Kilpelainen
Artiste aux talents multiples, Heidi Kilpelainen se produit dans des cabarets et réalise des performances. Elle enregistre les vidéos clips de ses propres chansons. Dans un registre pop déjanté à souhait, elle tourne en dérision les travers de notre époque : consumérisme, évolutions technologiques, vision formatée des médias, culte des stars… Dès son plus jeune âge, attirée vers l’art et la musique, Heidi Kilpelainen se met en scène. En 1987, elle quitte la Finlande pour suivre à Londres des études artistiques au City of London Polytechnic, puis au Central Saint Martins College.
HK 119 est un produit créé par Heidi Kilpelainen. Sous ce nom, inspiré des codes barres, l’artiste joue tous les rôles : directrice artistique, auteur, compositeur, costumière, styliste, set designer, chanteuse et performeuse. C’est avec HK 119 qu’elle s’est fait connaître sur la scène anglaise et internationale.